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Refusant de céder à la sinistrose ambiante, les grands témoins réunis par le Figaro du 4 janvier 2015 voient la vie de façon délibérément positive, chacun à sa manière.

David Foenkinos* : « IL FAUT ARRÊTER DE PRÉVOIR LE PIRE »

On se dit toujours que l’optimiste est une sorte d’amnésique, légèrement benêt sur les bords, continuant à croire obstinément en un avenir radieux alors qu’il suffit d’ouvrir les yeux pour voir le désastre nous environnant.
D’une manière générale, on attribue une connotation négative à toutes les idées liées à la bienveillance ou aux ondes positives. Par exemple, quand on dit de quelqu’un qu’il est « gentil », cela veut plus ou moins dire qu’on le juge con. C’est dire ce qu’on pense de la gentillesse comme valeur.
L’optimisme se range dans la même catégorie.

Il faut se motiver pour s’armer contre la terreur du défaitisme, contre l’hégémonie des cyniques. C’est un combat à mener. De nos jours, Don Quichotte se battrait contre la sinistrose. Il faut sûrement être idéaliste pour espérer le meilleur, puisque les mauvaises nouvelles s’enchaînent au point de ne même plus nous toucher.

Doit-on pour autant se vautrer dans le pessimisme ? Se faire matin, midi et soir des injections de Cioran ? Lire en boucle les messages de Schopenhauer, tel « Tu n’as aucune chance, saisis-la » ? Cette exhortation est finalement plus positive qu’elle ne pourrait paraître. Et c’est peut-être ici que prend réellement la source de l’optimisme. Cela n’a rien à voir avec la béatitude ou la naïveté. Car s’il existe une époque où l’on ne peut plus passer à côté de la réalité, c’est bien la nôtre.

Perfusés que nous sommes en permanence aux informations, aux témoins, aux commentaires, le monde n’a jamais autant été éclairé par la lucidité. Ainsi, croire en l’avenir devient un véritable choix. Une façon positive de se proposer au destin.
On parle toujours du verre à moitié vide ou du verre à moitié plein. Finalement, cette image liquide est la meilleure. Voyons le verre à moitié plein. Et puis, si on a soif on peut toujours le boire ; ce qui nous donne un avantage désaltérant sur ceux qui le voient à moitié vide. Encore une raison d’agir en ce sens.

On raille trop la croyance du demain, et on laisse la place aux dépressifs de l’avenir et autres déclinistes. Il faut arrêter de prévoir le pire et interdire toute phrase commençant par « c’était mieux avant ». Non, la France ne se suicide pas ! Car la France est extraordinaire. Il suffit de voyager un peu pour s’en rendre compte.

Alors continuons à croire que tout est possible, sans pour autant s’aveugler. On se souvient de cette sentence de Billy Wilder à propos des hésitations des juifs allemands à quitter ou non leur pays à l’arrivée des nazis : « Les pessimistes ont fini dans une piscine à Hollywood, et les optimistes à Auschwitz. »

L’optimiste ne doit donc pas avoir des œillères. Il doit prendre en considération le pessimisme et décider le camp de l’espoir. C’est une sorte de dépressif joyeux. Après tout, si tout va mal, soyons heureux.

* Romancier, auteur de Charlotte, prix Renaudot 2014

Propos publiés dans Le Figaro du 4 janvier 2015

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