Aujourd’hui, ce qu’une entreprise recherche, ce sont des managers capables d’instaurer un mode de direction orienté sur une dynamique optimiste. Le savoir-être rejoint ici le savoir-faire, à travers la mise en application de principes de management générateurs d’énergie et d’enthousiasme.

La situation économique et sociale actuelle génère de l’anxiété. Accélération du monde et changements divers, perte des repères anciens et de la visibilité sur le futur, crainte de l’obsolescence des compétences et de la disqualification professionnelle, peur de l’imprévisible sous toutes ses formes, tels sont les ingrédients du doute et de la perte de confiance en soi et en la société, terrain d’élection du pessimisme collectif.

Face à cela, insérés dans une organisation qui exige d’eux toujours plus de performance, qu’attendent de leur encadrement les collaborateurs d’une entreprise ?
Trois choses assez simples, dont le point commun sera de nourrir la dynamique optimiste des individus ou des équipes.

1) En période d’incertitude, la première attente des collaborateurs concerne la fourniture régulière par leur manager de preuves de sens, à savoir une émulsion subtile mêlant le rappel de la direction à suivre (objectif, but, ligne de mire), l’utilité de ce qui leur est demandé (contribution) et la place occupée par eux dans ce processus (reconnaissance).

2) La deuxième attente est celle de marques de réassurance, que celle-ci porte sur la compétence du manager ou sur la confiance qu’il met dans sa propre action et celle de ses équipes, ainsi que dans leur capacité à affronter les défis du moment.

3) La troisième attente est celle d’un climat de travail adapté aux périodes difficiles, que l’on pourrait qualifier d’optimisme convivial et tonique. Face aux tensions nées des objectifs exigeants et d’une conjoncture marquée par la raréfaction des moyens et des ressources (financières, matérielles, humaines, etc.), l’atmosphère de travail entretenue par le manager doit permettre à son équipe d’affronter les difficultés sans risquer le doute ou le désespoir.

À quoi reconnaît-on un manager optimiste ?

Le manager optimiste, comme tout manager, doit faire réussir une équipe, c’est-à-dire aider ses membres à atteindre les objectifs fixés, rendre ses collaborateurs plus autonomes quant à leur performance et leur permettre d’évoluer professionnellement.

Ce n’est pas sur la finalité de son action que le manager optimiste va faire la différence mais sur ses principes et méthodes d’action. On reconnaît un manager optimiste à quatre attitudes fondamentales qui structurent sa relation avec les membres de son équipe :

1) Le manager optimiste concentre l’essentiel de son action sur les «points forts», c’est-à-dire sur les qualités des personnes et sur leur potentiel.

Pour un manager positif, ses collaborateurs disposent de deux types de ressources d’action : des points forts à cultiver et renforcer et des points d’effort, sur lesquels il est possible de s’améliorer et de progresser. Concernant les points faibles, à savoir les gros défauts, les carences structurelles, etc. ils sont une réalité objective mais ne peuvent être utilisés pour produire une performance. On ne peut donc que les ignorer, voire les neutraliser en les compensant, par un développement extrême de certains points forts.

2) Le manager optimiste privilégie les solutions partielles efficaces.

Le manager pessimiste aime à se nourrir de l’analyse méticuleuse des causes des échecs. Ce faisant, il produit presque toujours de la rancœur et des regrets, débouchant immanquablement sur la justification et la recherche de coupables. Le manager pessimiste apprécie aussi le perfectionnisme à travers la recherche – souvent vaine – de solutions idéales, parfaites, qui règleraient en une seule fois la totalité des problèmes.

Le manager optimiste quant à lui, voit les choses différemment. Savoir « pourquoi » on en est arrivé là, surtout en cas de difficulté majeure, est certes intéressant ; mais la recherche des causes constitue souvent une perte de temps. Confronté au «pourquoi» du pessimiste, le manager optimiste privilégie toujours le «comment faire pour», c’est-à-dire la recherche d’alternatives ou d’opportunités nouvelles nées de la difficulté rencontrée. Le manager optimiste n’a pas besoin de connaître l’origine ou le responsable de l’obstacle pour explorer des chemins destinés à le contourner.

3) Le manager optimiste traque les « petites victoires »

Chacun aime à être félicité après avoir gagné. Mais chaque jour étant un nouveau jour, ce n’est pas parce que l’on est félicité aujourd’hui que l’on sera davantage motivé demain, ni que l’on gagnera à coup sûr.
En revanche, c’est bien le fait d’être encouragé pendant qu’on est en train de faire un effort, qui contribue à entretenir notre confiance en nous-mêmes, notre désir de poursuivre l’effort et notre optimisme quant à la réussite à venir.

Le manager optimiste garde certes l’œil rivé sur la ligne de mire de l’objectif à atteindre. Mais il ne perd jamais une occasion de célébrer avec ses troupes une victoire d’étape, un match remporté, un obstacle franchi avec brio, un effort qui a payé, une avancée technique ou un nouveau client. Bref, le manager optimiste aime prendre ses collaborateurs en « flagrant délit de réussite », aussi modeste soit-elle. C’est d’ailleurs dans ces occasions que le manager peut entraîner ses troupes à la pratique du « style explicatif optimiste », en analysant avec eux en quoi ce succès est dû à leur action propre, en quoi il illustre des compétences durables de l’équipe et en quoi il a vocation à se reproduire dès que possible…

4) Le manager optimiste pousse à la persévérance et à la prise de risque.

Si les managers pessimistes anticipent et redoutent systématiquement l’échec, les optimistes savent que l’échec fait partie de la vie des organisations et qu’il n’est qu’un ingrédient du succès comme les autres. Peut-être un peu plus amer, et encore…. Etre préparé à l’échec, pour un manager optimiste, c’est à la fois savoir ce que l’on fera si les choses tournent mal et se donner par avance le droit de réessayer, de tenter à nouveau.

Car si l’optimisme est un facteur de réussite si puissant, c’est essentiellement parce qu’il crée les conditions psychologiques et relationnelles de la persévérance. Un manager optimiste est donc un manager qui accorde le droit à l’erreur, dès lors que cette erreur peut-être analysée et représenter une source d’apprentissage. Un manager optimiste est aussi celui ou celle qui donne à son collaborateur la permission d’innover, de faire bouger les lignes.

Un manager optimiste est celui dont on peut dire: « Il m’a donné envie d’essayer, m’a permis de ne pas réussir tout de suite, et m’a poussé à recommencer jusqu’à ce que je gagne la partie ! ».

Et peut-être aussi est-ce pour cela que nombre de managers optimistes semblent tellement « porter chance » à celles et ceux qui travaillent avec eux !

Philippe Gabilliet
« Éloge de l’optimisme. Quand les enthousiastes font bouger le monde » Ed. Saint Simon, 2010.